L’accès à la terre demeure une équation à plusieurs inconnues pour les femmes rurales au Cameroun et ce, en dépit du rôle important qu’elle joue dans la sécurité et la souveraineté alimentaire. C’est l’essentiel à retenir de cette conférence qui a réunie 75 femmes leaders venues des différentes zones agro-écologiques du Cameroun.
Si elles constituent 50.6% de la population et que 52% d’entre elles vivent en zone rurale tel que documenté dans le 3e recensement Général de la Population et de l’Habitat publié en 2005 et qu’elles fournissent environ 90% des denrées nécessaires à la subsistance de la population (FAO), il est fort regrettable de constater combien le faible accès à la ressource foncière réduit les capacités de production des femmes.
L’accès à la terre est indispensable pour produire de la nourriture et créer des revenus. C’est aussi un atout social et économique déterminant qui donne accès à l’identité culturelle, au pouvoir politique et à la prise de décisions ; du moins c’est thèse que portent fièrement les organisations de femmes membres de la CNOP-CAM. « Seulement, les préjugés sociaux et les pesanteurs culturelles sont souvent responsables d’une injustice sociale » note Joël Ngoundé expert du foncier rural, Panéliste.
Même si le cadre juridique laisse entrevoir un éventail d’opportunités, « il est important de relever qu’il subsiste une dualité entre la loi coutumière et le droit positif », mentionne Joseph Azebaze du Réseau Camerounais des Organisations des Droits de l’Homme (RECODH). Aussi, il importe d’améliorer le dispositif informationnel et les structures de capacitation des femmes. Approche que porte la CNOP-CAM dans sa stratégie d’action.
Pour Elisabeth Atangana, présidente de la Concertation Nationale des Organisations Paysannes du Cameroun (CNOP-CAM), la table ronde servait de prétexte pour « renforcer les capacités des femmes rurales en matière de droit foncier et sur les mécanismes de plaidoyer ». Elle va relever au passage que « la négociation est la clé de voûte pour un accès des femmes au foncier. Les réformes sur le plan coutumier doivent certes s’opérer mais cela ne se fera que si les femmes maitrisent l’art de la négociation ».
Des échanges, on peut retenir que l’un des freins à l’accès à la terre est l’arrogance des femmes. « Une fois qu’elles ont le pouvoir entre les mains, on ne respire plus dans la maison » relève un participant. « Ce sont des situations qui peuvent arriver et il importe pour les femmes de savoir quelle place est la leur dans le couple » va renchérir Elisabeth Atangana.
L’expert Joel Ngoundé pense pour sa part que « l’accès à la terre passe par l’autonomisation des femmes. Elles doivent développer leur pouvoir d’achat et ainsi acquérir leur portion de terre » ; ce qui n’a pas semblé pas être du goût des quelques hommes présents.
Pour son mot de fin, Joseph AZEBAZE estime que « la loi n°76/25 du 14 décembre 1976 portant organisation cadastrale permet de résoudre la plupart des problèmes que nous rencontrons de nos jours puisqu’elle permet de délimiter même des parcelles sur lesquelles les populations ont des droits coutumiers ». Son application effective constitue à coup sûr une avancée notable dans le processus d’accès à la terre pour les femmes.
La seconde partie de la journée a été consacrée aux ateliers de groupe. On parle d’investissement agricole et plaidoyer sur le foncier. Les participants se recrutent essentiellement parmi les organisations de femmes et de jeunes des différentes zones agro écologiques du Cameroun. Il est à noter qu’un document a été élaboré à la fin des travaux pour servir de base pour le plaidoyer à venir.