Image bio-digesteurs permettant aux ménages des zones rurales de la région de l’Adamaoua de produire du biogaz à partir de la bouse de vache (SNV, 2013) |
Le
monde entier est aujourd’hui confronté à l’urgence aiguë d’une
crise intergénérationnelle qu’est le changement climatique. Pour
y faire face, les énergies renouvelables ont été identifiées par
de nombreux experts comme une solution de développement soutenable
et sobre en carbone.
Les
plus grandes puissances industrielles du monde s’y convertissent
peu à peu, abandonnant progressivement les formes conventionnelles
d’énergies qui se sont avérées extrêmement polluantes pour
l’environnement.
Par
contre, bon nombre de pays moins industrialisés malgré quelques
effort tardent à franchir le cap. En effet, tout comme les autres
pays d’Afrique centrale, le Cameroun dispose d’importantes
ressources énergétiquesvariées. Des études dont les résultats
sont repris dans le Plan Energétique National (PEN), indique qu’il
dispose d’une insolation moyenne de 4,9 KWh/m²/j, soit 4 KWh/m²/j
pour la partie sud du pays et 5,8 KWh/m²/j pour la partie
septentrionale. Cette énergie est estimée à 89,25 TWh/an et est
exploitable sous deux formes, thermique et photovoltaïque. De même,
les résidus de récoltes et autres déchets ruraux et urbains,
animaux ou végétaux, ménagers ou industriels, sont de bonnes
sources d’énergie jusqu’ici non valorisées. A titre d’exemple,
une étude menée par GIZ, estime à 2,45 millions m³, soit environ
1.20 millions de tonnes, le volume de résidus de bois générés par
la production ligneuse au Cameroun.
Malgré
ce potentiel, la population camerounaise fait face à un problème
sérieux d’accès aux services énergétiques de base. Les
statistiques démontrent que près de 46% de cette population n’a
pas accès à une énergie durable (BM, 2012). Sur les 13104
localités que compte le pays, moins de 3000 sont électrifiées.
C’est ce qui explique le fait que le bilan énergétique du
Cameroun soit dominé par la biomasse (charbon de bois, bois de
chauffe). Il représente près de 53% de l’énergie consommée1.
La situation est plus criarde en zones rurales où elle compte pour
plus des 80% de l’énergie primaire.
Cette
demande urbaine et rurale en bois de feu et en charbon de bois est un
facteur important du déboisement du territoire1
et augmentera en chiffres absolus dans les années à venir avec des
rétroactions négatives sur les systèmes climatiques si rien n’est
fait.
Dans
le même temps, ce faible niveau d’accès à l’énergie n’a pas
facilité l’atteinte des OMD au Cameroun2,
et ne facilitera non plus la réalisation des ODD dans l’avenir.
Face
à cela, l’impératif de trouver des stratégies permettant
d’assurer l’approvisionnement des ménages ruraux en source
d’énergie domestique durable se pose de plus en plus avec acuité.
S’il est vrai que l’hydro énergie3
apparait en pôle de position dans la politique de développement du
secteur énergétique au Cameroun, nous estimons qu’elle présente
plusieurs controverses sociales et environnementales. De plus elle ne
sera pas, à elle seule en mesure de répondre à la demande de plus
en plus croissance observée et encore moins d’atteindre les
localités les plus reculées.
Dès
lors, même si l’hydroélectricité paraît comme un bon moyen de
développer des énergies propres pour le secteur de l’industrie
camerounais, le solaire et la bioénergie(issue de la valorisation
des déchets organiques inexploités (rebus forestiers, déchets
organiques d’élevage, etc.)semblent plus adaptées pourfournir une
électricité verte aux populations locales.
Elles
sont dans le contexte camerounais des solutions idoines pour répondre
à cette double préoccupation c’est à dire de relever le défi
lié au transport de l’énergie vers les zones de consommation
locales, de réduire la pression sur les ressources ligneuses et de
ce fait réduire la déforestation. Un rapport d’OXFAM fait état
de ce qu’elles constitueraient une source d’énergie plus
abordable que le charbon pour les populations pauvres des pays en
développement à travers le monde et une opportunité réelle
d’accès à l’énergie pour celles-là qui sont le plus souvent
éloignées des centres de production.
installation d'un panneau solaire par un jeune Baka(PA) formé dans le cadre du PODC-Momedjoh |
A
ce propos, bien que cette énergie de proximité constitue à tous
points de vue une solution durable à l’électrification des
localités du Cameroun, il faut toutefois relever que la mise en
place d’un tel dispositif fait face à un cadre politique et
réglementaire en la matière plus ou moins absent, ce qui ne
facilite pas le déploiement des institutions étatiques et non
étatiques connexes ; au faible niveau de développement
technologique du pays ; au coût d’investissements en la matière
plus ou moins élevé malgré la baisse significative des coûts de
technologies sur le marché international et surtout à de faibles
capacités des acteurs locaux à la base à développer ce types
d’alternatives.
Dès
lors, nous espérons que dans un contexte marqué par les changements
climatiqueset compte tenu de l’intérêt qui doit être accordé à
cette problématique, les différentes parties prenantessauront
mettre en place des politiques et stratégies adéquates efficaces
pour relever ces différents défis. A titre de recommandations, nous
proposons à différentes échelles que :
Au
niveau international,
les
pays développés doivent clarifier le plan sur les 100 milliards de
dollars US d'ici2020.
la
COP 21 de Paris doit prendre des engagements concrets pour la
redirection des investissements des énergies fossiles vers les
énergies propres
la
COP21 de Paris doit encourager et soutenir financièrement les bonnes
pratiques énergétiques et leur mise à l'échelle afin de
s'attendre à une baisse considérable des émissions de GES.
La
COP 21 de Paris doit prendre des engagements concrets en matière
deTransfert de technologie vers les PMA au regard de leurs potentiels
de réduction des GES
Au
niveau national
la
définition d’une politique énergétique nationale qui tiendrait
compte des opportunités de valorisation des sources d’énergie
renouvelables disponibles, les opportunités à saisir dans le cadre
du mécanisme REDD+ et intégrerait la spécifié des différentes
régions du pays. Celle-ci devra se traduire à terme par la mise en
place d’une réglementation et d’une stratégie efficace et apte
à impulser et à réguler le secteur des énergies renouvelable en
générale, du solaire et bioénergie en particulier ;
la
création et le fonctionnement dans l’immédiat l’agence en
charge de la promotion du développement des énergies renouvelables
tel que prévue dans la loi de 2011 ;
le
renforcement des capacités techniques et financière de cette
structure
la
sensibilisation des acteurs locaux sur les changements climatiques et
les enjeux de l’énergie renouvelable
la
vulgarisation de la technologie verte au sein des universités et la
promotion des emplois verts
le
renforcement des capacités des acteurs de la société civile et des
communautés locales sur la question des énergies renouvelables et
subventionner les projets de promotion des énergies solaire et de
valorisation des déchets organiques inexploités en bioénergie dans
les zones rurales.
1 D’après
le bilan énergétique du Cameroun, en 2010, la production totale
d'énergie a été de l’ordre de 8 521 ktep dont 53 % de biomasse,
43 % de produits pétroliers et seulement 4 % d’électricité
2 Les
premières études menées nous ont permis de constater que les
causes de déforestation et de dégradation des forêts au Cameroun
sont au premier rang la conversion des forêts pour l’agriculture
et la récolte du bois de feu
3 L’amélioration
de l’accès à l’énergie dans les pays en voie de développement
a été définit par les Nations Unies comme un pré requis à
l’atteinte des
OMD
Par STEVE ZANGUE
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